jeudi 21 mai 2009

Arnaque, fumisterie, imposture



Dans un « post » récent, je vous recommandais quelques vins. Je me suis bien amusé à écrire ce texte. Je l’ai truffé d’indices et d’allusions à ma grande supercherie. De petites phrases comme « A beau mentir qui vient de loin », etc.

Tous les vins sont des inventions de mon esprit. L’idée m’est venue dans le RER, alors que j’observais la carte du réseau, avec ses noms évocateurs. De jolis noms aux sonorités parfumées, comme « La Garenne Colombes », ou d’aspect petite noblesse, comme « Lamarck Caulaincourt ». Je me suis dit que les oenologues nous vendent leurs breuvages avec des noms comme ceux-là.

La plupart des gens, dont moi, ne sauraient trop quoi dire d’un vin s’ils le goûtaient à l’aveugle. C’est bon. C’est pas bon. C’est léger. C’est corsé. Comme on ne connaît pas trop le vocabulaire de l’oenologie, on évite de trop parler, question de ne pas dire de connerie. On ose « fruits rouges », « vanille », « boisé », mais on ne va pas trop loin.

Source photo : wikipedia.


Pour rédiger le texte, je suis allé voler quelques descriptions sur des sites de « professionnels » du vin. Et je les ai retravaillées. J’ai remixé, j’ai fait des collages. Et je suis assez satisfait du résultat : un beau gros bla-bla crédible avec de belles expressions à 100$ comme « tanins souples », « vin ample » ou « texture veloutée ». En cherchant mes descriptions de vins, de site web en site web, j’ai remarqué que les supposés « professionnels » racontent à peu près toujours la même chose, peu importe le vin. Dans le rouge, les mêmes trucs reviennent : « petits fruits », « fruits des champs », « baies », « prune », « torréfaction », « café », « vanille », « rondeur », « acidité », « boisé ». La seule vraie différence, c’est la partie anecdotique de la description, qui souvent ne parle pas trop du vin en soi. Des trucs comme : « ce petit producteur expérimenté travaille des terres pentues, bien exposées au soleil ».

J’ai ensuite inséré des absurdités. C’est le cas de mon « Maison Raymond Queneau, Merlot 2007 », une appellation Val de Fontenay, située non loin d’Évreux, dans la région des Côtes-d’Armor. Curiosité géographique s’il en est une, car Évreux n’est pas une ville des Côtes-d’Armor, et Val de Fontenay est une station de RER aux portes de Paris. De plus, je doute que la Normandie produise beaucoup de vin (bien que ses calvados soient magnifiques).

Par moment, j’ai poussé le bouchon très loin. Notamment pour mon « Domaine Bagneux, Merlot-Syrah 2001 », que je dis « imprégné du soleil de l’Isère ». Cette région, l’Isère, est surtout connue pour ses stations de ski. On n’est pas loin d’Albertville, qui a tenu des J.O. d’hiver en 1992. Bon, les Français planteraient de la vigne jusque sur la lune, mais quand même, y’a de quoi semer un gros doute.

Tout ça pour dire qu’en matière de vin, il est facile de baratiner le non-expert. Et je me demande parfois si nous ne sommes pas victimes de l’espèce de cérémonial un peu pompeux entourant le vin. Tout ce délire au sujet des millésimes, des AOC, des terroirs, etc. Le Larousse des vins qui nous cartographie la France presqu’au millimètre. Un « détaillisme » excessif? On ne va jamais aussi loin pour le fromage. Pourtant, d’un coteau à l’autre, le camembert change de goût et de parfum. Mais on dit « un camembert », et non « Camembert Clos des Marguerites 2007, lait de vache Holstein ».

J’ai goûté en France les meilleurs vins de ma vie. Des breuvages magnifiques. Ce qui est bien en France, c’est que le vin y est vendu à prix honnête. Alors on goûte, et si on n’aime pas, on ouvre autre chose. À l’équivalent de 8$ canadiens, on trouve déjà du bon vin. Le meilleur truc que j’ai goûté valait environ 20$ canadiens. Meilleur que toutes les folies à 60-75$ de la SAQ. Il y a dans le rayon « spécialités » de la SAQ certains vins à haut prix qui s’avèrent plutôt ordinaires, sans personnalité, genre Bordeaux un peu « recette », plats, classiques à mourir.

Selon moi, pour apprécier le vin, pas vraiment besoin d’expertise. Faut y aller sans complexe. Le critère « ça me plaît / ça ne me plaît pas » est déjà suffisant. Il faut connaître 3 ou 4 régions et cépages, essayer des trucs, se faire dans sa tête quelques grandes catégories. Maintenant, je sais que j’aimerai un Sancerre, ou un Pouilly-Fumé, parce que ces AOC font généralement des blancs un peu plus secs, un peu plus « citron » que « mangue ». Je sais que je préfère les vins du sud quand je cherche à me réchauffer, et le Bourgogne quand je veux plus léger. Je sais que les Bordeaux peuvent parfois manquer d’audace, alors vaut mieux goûter avant d’acheter. Je sais que l’âge du vin n’est pas nécessairement gage de plaisir. Il y a un coût à faire vieillir un vin, ne serait-ce que l’entreposage. Alors si un 1999 est vendu pas cher, il y a anguille sous roche. C’est peut-être pas beaucoup comme savoir, mais ça me suffit. Les élucubrations à propos du vignoble du huitième vallon à gauche, je laisse ça aux passionnés. L’approche naïve m’offre suffisamment de plaisirs.

Je vous laisse ces liens vers quelques uns de mes vignobles imaginaires. Ils sont tous situés en non-loin de Paris.
Bobigny-Pantin / Raymond Queneau
Rueil-Malmaison
Paul Vaillant-Couturier


1 commentaire:

sylviane a dit…

Hello Paul, si tu portes moustaches tu as dû te les friser bien graves avec mon idée de dégustation de Gigondas en réponse à tes propositions :-)Mais comme le ridicule ne m'atteint plus depuis longtemps (le bénéfice de l'âge, Oups!!!)je persiste et signe, ce vin du Sud-Est est excellent avec la viande rouge et les fromages qui puent! Bonne dégustation si l'envie t'en prend.

Bon wique imposteur vinicole et au plaisir d'autres absurdités de ce genre Héhé!!